C'est bien sûr un des aspects de la gigantesque guerre contre les salaires en cours. Les fonctionnaires jouissent d'un salaire à vie en fonction de leur qualification personnelle. Ils se montrent consciencieux, compétents, honnêtes, créatifs, soucieux du travail bien fait. À l'occasion de conflits socio-politiques, ils se montrent combatifs, organisés, déterminés, solidaires et courageux.
Toutes ces qualités sont incompatibles avec l'emploi. Ou, pour le dire autrement, c'est parce que les qualités des fonctionnaires sont incompatibles avec l'emploi qu'on les met en emploi. On les prive de leurs qualités pour en faire des machines résignées et terrorisées, des machines à faire des profits pour les actionnaires.
Extrait
Chez Belgacom, les statutaires sont déjà minoritaires. Ils ne pèsent plus que 42 %. Idem à la RTBF où la barre des 50 % a été franchie il y a un an. Aujourd’hui, ils représentent 45 % des effectifs.
Bpost s’apprête à les rejoindre. Ce phénomène est appelé à se poursuivre.Sur les fonctionnaires, voici ce qu'en écrivait Yvan Perez, un ami français.
Tous les nouveaux travailleurs sont engagés via un contrat de travail classique. Les statutaires étant les plus âgés de l’entreprise, leur nombre s’érode naturellement chaque année avec les départs à la pension.
C'est insupportable d'entendre affirmer à longueur de journée (et même sur le service public) que la fonction publique est une "charge", que les fonctionnaires "dépensent mais ne produisent rien"... C'est le discours qui est tenu dans le fond. Faut-il donc rappeler aux prétendus experts qui font passer ces salariés pour des "privilégiés" que le travail des fonctionnaires - c'est à dire la valeur économique produite et mesurée à travers leurs qualifications - est comptabilisée dans la production du PIB depuis le milieu des années 70 ?!
En 2013, les administrations publiques ont contribué au PIB à hauteur de 354 milliards d'euros (chiffres INSEE - comptes base 2010, pas très difficile à vérifier). Pourquoi ne pas le signaler pour bien poser le débat ? Comment peut-on laisser affirmer à l'antenne que "les fonctionnaires coûtent trop cher" sans préciser qu'ils produisent également ? Comment croire ceux qui affirment - sans savoir de quoi ils parlent finalement - que la fonction publique ne peut pas être financée et que les fonctionnaires ne produisent rien, qu'ils sont une "charge" sur l'économie alors que même l'INSEE indique dans tous ses chiffres que la fonction publique participe à la production du PIB, et ce depuis plusieurs décennies maintenant ?
Il est nécessaire d'apporter une objection je crois : un fonctionnaire ne dépense pas plus qu'un autre salarié, et si on compte uniquement en dépenses sans parler des recettes, alors il faut aussi rappeler que TOUS les salariés dépensent, ceux du public comme ceux du privé, bien évidemment. Et ces effets de langage qui tendent à faire passer les fonctionnaires pour "une dépense insoutenable en temps de crise" sont le fruit d'une idéologie qu'il faut dénoncer et pouvoir contredire, sinon la démocratie n'existe plus et il n'y a plus que les vérités déclarées qui comptent.
[Il faudrait] pourtant être apte à défendre ces salariés (du public) et leurs qualifications personnelles sans tomber dans le piège de son interlocuteur, sans opposer ainsi le privé et le public, sans opposer les employés aux fonctionnaires qui seraient dépendant de l'emploi, ce qui est totalement faux. Ils sont dépendants (pour leur salaire) du secteur marchand comme tout le monde, puisque c'est là que se concentre toute la monnaie, mais pour autant le secteur non marchand produit lui aussi de la valeur... Et ce qu'on observe dans l'impôt n'est pas un flux de valeur mais seulement un flux de monnaie !
Loin des vérités déclarées (sauf à croire que l'INSEE est une église) la réalité est que les fonctionnaires, comme les employés dans le privé, participent à la production du PIB. Moins de fonctionnaires c'est donc moins de PIB (austérité = dépression) sauf si on transforme leurs activités en emploi à la place, en transformant ainsi la fonction publique en marché du travail, les postes des fonctionnaires en emploi. Et c'est bien ça le rêve de la classe capitaliste qui ne supporte pas l'idée que des gens puissent travailler et produire sans mettre en valeur aucun capital pour des actionnaires (car pour le capitalisme il est important de nier l'humain en tant que producteur, le réduisant alors à un simple consommateur, à une marchandise - une ressource - devant se vendre sur un marché où viennent se servir les propriétaires lucratifs, les actionnaires et autres investisseurs qui sont les vrais employeurs au fond, c'est à dire ceux qui décident de ce qui est investi ou pas, de qui travaille ou pas, de ce qu'on produit ou pas).