Extrait (résumé et traduction)
La faiblesse des salaires sape le moral
Oui, ils ont des emplois ... mais les cinq personnes ci-dessous sont représentatives de millions d'autres qui n'ont pas de sécurité, pas de vacances ou de congés maladie indemnisés, des horaires définis et qui n'ont pas de dignité au travail.
Sur une plage au nord du Devon, un groupe de femmes montre ses compétences au hula-hop avec la classe de remise en forme dirigée Marcela Almond, 35 ans. Elle est l'une des nouveaux auto-entrepreneurs, des indépendants qui sont souvent montrés comme preuve du redémarrage de l'économie britannique.L'emploi continue à augmenter alors que le taux de chômage est tombé à 6,4% le mois dernier, le plus bas depuis 2008. Une partie de la croissance de l'emploi s'explique par le fait que 40% des nouveaux jobs créés depuis 2010 sont des conversions à l'auto-entreprenariat, ce qui a fait de la Grande-Bretagne la capital de l'auto-emploi en Europe occidentale.Almond n'a pas toujours été auto-entrepreneur. Elle était professeur au Collège Barnastaple d'art de la scène pendant cinq ans, jusqu'à ce qu'elle soit remerciée en novembre 2012. "Pendant des mois, je n'ai pu obtenir même un boulot de nettoyeuse" dit-elle. "Je me démoralisais." En mars dernier, elle a utilisé 2000 livres [2500€] de ses indemnités de licenciement pour se former comme professeur de fitness et monter sa propre affaire.
Elle travaille deux jours par semaine, gagne 350 livres par mois [440€] et ses cours peuvent rapporter 400 livres par mois (500€). Mais, dit-elle, "S'il fait beau, je peux avoir payé 10 livres (12,5€) pour louer la salle et n'avoir que deux dames qui paient 5 livres chacune dans un cours. C'est imprévisible".
Elle gagnait 32.000 livres par an comme professeur (40.000€ par ans, 3350€ par mois). Maintenant, elle gagne 9.000 livres, sans congés payés, sans indemnités maladie et sans aide sociale. Elle a hypothéqué une seconde fois sa maison. Son conjoint, un mécanicien qualifié, gagne 7,5 livres par heure (9,4€) - une personne sur quatre dans le Devon gagne moins que le salaire minimum pour vivre de 7,65 livres de l'heure en dehors de Londres et de 8,8 livres à Londres. "Je travaille 12 heures par jours et l'argent est un souci constant. Notre boiler est tombé en panne l'année dernière de sorte que nous n'avons pas eu de chauffage pendant tout l'hiver. Il semble que nous n'aurons toujours pas de chauffage cet hiver."
Selon la Resolution Foundation, un quart des auto-entrepreneurs de ces cinq dernières années préférerait travailler pour un patron. Comme les employeurs utilisent des tactiques toujours plus agressives pour réduire les coûts du travail et réduire les possibilités d'action collective, la productivité souffre et des solutions d'emploi vues comme provisoires au départ s'installent dans la durée. Le fossé entre les plus riches et les autres s'étend.
[voir notre article sur la surproduction: comme les riches ne dépensent pas leur argent - contrairement aux pauvres - et que les pauvres s'appauvrissent, il y a une crise de la demande] (...)
Cette histoire de stagflation des salaires et des travailleurs pauvres ne s'applique pas que en Grande-Bretagne. Au delà des discours du premier ministre sur la reprise économique, il y a des légions de familles et de communautés à travers tout le pays qui arrivent juste à ne pas couler. Peu importe le nombre de fois qu'Osborne le répète, cela ne fait pas la vérité. Des millions d'Anglais ne sont pas en reprise. Le golfe entre ceux qui montent et ceux qui restent grandit chaque mois.
(...) En Grande-Bretagne, comme ailleurs, le sous-emploi, le manque d'investissement dans la formation et les bas salaires sont généralisés. En Grande-Bretagne, 40% des temps partiels - surtout des femmes - voudrait travailler davantage selon une enquête. En même temps, pour beaucoup de bas salaire, les dernières années ont vu le coût de la vie augmenter alors que leur salaire coulait. Des syndicats ont lancé une procédure de vote pour voir si en octobre la sécurité sociale partirait pour la première fois en grève depuis 1982.
Est-ce le début de la contre-attaque? "L'une des préoccupations principales de l'économie depuis 2008, c'est la division des postes de travail" dit Martin Smith, le secrétaire national du syndicat GMB. "Ce qui était autrefois un emploi de 40 heures par semaine est maintenant souvent quatre emplois en contrat zéro heure [voir ici] de dix heures. Notre syndicat a été fondé pour se battre pour réduire la journée de 12 heures à 8 heures. Maintenant, les mêmes employés donneraient leur bras droit pour une journée de 8 heures. Ce ne sont pas seulement les heures trop rares, c'est l'humiliation. Sur un contrat de 12 heures hebdomadaire, il est difficile d'obtenir des crédits, des hypothèques et les heures supplémentaires sont à la discrétion du DRH, une situation qui peut générer de la rage. Plus de 8 millions de personnes travaillent dans ces conditions précaires."
(...)
À Devon, Marcela Almond accuse le coup. "Je ne sais pas où m'en aller d'ici. Est-ce qu'on voudrait fonder une famille? Mon Dieu, oui, mais nous n'avons pas les moyens de nous entretenir et encore moins un enfant. Cela ne peut pas fonctionner."