Dans MyEurop (
ici, en français)
Effy Tselikas nous raconte la lutte victorieuse (à présent) des femmes de ménage licenciées par un ministre grec au nom de l'austérité. Extrait pour vous mettre en bouche.
Après 10 mois de combat, quatre
cents femmes de ménage licenciées par le ministère des finances
garderont finalement leur emploi. Le résultat d'une longue et symbolique
lutte, opposant une Grèce laborieuse et solidaire à un État
austéritaire. Récit.
Ce vendredi 16 mai, l'ambiance est guillerette sur les trottoirs du
ministère des finances, à Athènes. La nouvelle est tombée à l’aube : par
décision du Tribunal de première instance, 397 des 465 femmes de
ménage, dont la "mise en disponibilité" se terminait cette semaine,
devront être réintégrées à l'effectif du ministère.
Demain, leur avocat viendra leur en faire l’annonce officielle devant
le ministère. Rappelons les faits : l'été dernier, ces fonctionnaires,
déjà pas les mieux loties, apprennent à la télévision qu’elles sont
mises en disponibilité. Autrement dit, elles devront vivre pendant 8
mois avec 75% de leur salaire et, au bout de ce tunnel, le licenciement.
Face aux protestations, le ministère des finances – leur employeur -,
et celui de la réforme administrative - qui vise la suppression de 15
000 postes de fonctionnaires en un an - se renvoient la balle.
Le ministre de la réforme, Kyriakos Mitsotakis, joue le rôle du clown
blanc. Son message : je vous comprends, je compatis, mais j’ai les
mains liées. Quant à Giannis Stournaras, ministre des finances, il
endosse celui du contre-pitre: il ne les recevra que 6 mois plus tard
pour leur avouer crûment qu’il "faut un certain nombre de départs" et
que, rapportent les femmes de ménages, celles-ci sont "les moins fortes,
les moins susceptibles d’être soutenues, ce sont donc (elles) qu’on a
donc ciblé en priorité".
© Effy Tselikas
"Elles"? Des femmes, 50 ans en moyenne, mères de famille,
grands-mères souvent, veuves, divorcées, très peu diplômées. Autant dire
que leur chance de retrouver un emploi en Grèce aujourd'hui est nulle.
Licencier ces femmes de ménage rapporte pas mal d'argent:
La décision judiciaire ne met pas fin au combat. Les élections
municipales et européennes de ce mois de mai vont peut-être faire
avancer les choses. Une des licenciées, Dimitra Manoli, est d’ailleurs
candidate sur la liste européenne du SYRIZA, la gauche radicale, en
bonne place pour être élue, juste derrière une autre travailleuse de ce
secteur, Konstantina Kouneva.
L’histoire de cette syndicaliste d’origine bulgare, vitriolée par des gros bras des sociétés de nettoyage pour sa lutte,
avait ému toute l’Europe. Le secteur de la propreté en Grèce est au
cœur des privatisations. Partout, dans les ministères, les
municipalités, on vire ces employées pour les remplacer par des sociétés
de nettoyage, qui emploient des précaires, corvéables à merci.