23 oct. 2017

Harcèlement des chômeurs en Suisse

Le Monde Diplomatique met en accès libre un article sur les maltraitances institutionnelles des chômeurs en Suisse ici.

Extrait
Au chômage depuis plus d’un an, Claude, électricien de 50 ans, a demandé à suivre ce que l’on appelle communément en Suisse une « mesure active ». Son conseiller en placement l’a assigné à un « programme d’emploi temporaire » dans une université. Content de pouvoir exercer ses compétences, il commence par affirmer que le prestige de l’institution compense l’absence de salaire pour le travail effectué. Mais l’aura ne résiste pas longtemps au sentiment d’exploitation et à l’impression que ses « collègues » lui réservent le sale boulot : « Ce serait plus valorisant pour moi si je recevais un salaire. Pendant que je suis ici, c’est quand même l’assurance-chômage qui paie, et pourtant, pour le patron qui m’emploie, je suis un ouvrier, une force supplémentaire de travail ! »

Daniela, elle, est arrivée en Suisse à l’âge de 10 ans. Après avoir terminé la scolarité obligatoire sans décrocher de diplôme, elle a travaillé plusieurs années dans une usine. Le jour où celle-ci a fermé, elle s’est retrouvée au chômage. A 23 ans, elle a encore la vie devant elle et nourrit fermement l’espoir de devenir vendeuse. Au moment de notre rencontre, elle a un petit garçon de 2 ans et est enceinte de huit mois. Elle vit un calvaire : « Mon conseiller m’a obligée à faire quelque chose pour que je ne reste pas à la maison. Mais pour moi, ce n’est vraiment pas facile. » Se moquant ouvertement de ses projets professionnels, son conseiller en placement l’a envoyée dans une « entreprise » de tri de déchets électroniques qui fonctionne uniquement avec des sans-emploi. Elle se lève à l’aube pour amener son fils chez sa mère et s’échine ensuite toute la journée à démonter des télévisions usagées. Elle n’ose pas dire que son activité met sa grossesse en danger, de peur d’être sanctionnée ou, pire à ses yeux, de perdre son droit aux indemnités de chômage et de se retrouver mère au foyer.

De son côté, Joshua attend la retraite avec impatience. Logisticien de formation, à l’assistance publique depuis cinq ans, il décrit cette période comme une descente aux enfers. Lorsque son conseiller lui propose d’exercer une activité, il se montre enthousiaste. D’autant que l’intitulé de son poste est le même qu’au temps où il avait un emploi. A une différence près : aujourd’hui, il remplit des fiches de commandes fictives pour des clients imaginaires.